Vers l'horizon

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"Le Cas Eduard Einstein" de Laurent SEKSIK par Isabelle Regout

Un pur et heureux hasard m’a fait mettre la main sur Le Cas Eduard Einstein de Laurent SEKSIK.

 

Saviez-vous qu’Albert Einstein avait deux fils ? Sa première épouse, Mileva Maric, est une serbe orthodoxe, étudiante comme lui à l’Ecole Polytechnique Fédérale de Zurich. Leurs enfants, on le devine, sont brillants, mais Einstein ne s’en occupe guère laissant toute la charge de leur éducation à son épouse qu’il quitte en 1914. Elle résidera jusqu’à sa mort à Zurich pendant qu’Einstein enseigne à Berlin, puis menacé par les nazis, s’exile aux Etats-Unis où il est accueilli avec défiance. Ceci est dû à ses positions en faveur des minorités noires et à ses positions pacifistes. Il y décédera en 1955.

 

Ses fils sont dotés d’une brillante intelligence héritée à la fois de leur père et de leur mère. L’aîné, Hans-Albert, également accueilli aux E.-U., y sera ingénieur, docteur en sciences techniques et professeur. Quant à Eduard, extrêmement cultivé, pianiste à ses heures, passionné par la psychologie et particulièrement par Freud, il se destine à être psychiatre. Pendant qu’il est étudiant en première année de médecine à la Faculté de Zurich, il sombre dans la schizophrénie avec des accès de paranoïa et des tentatives de suicide. Cette folie ne le quittera guère tout au long de sa vie malgré les tentatives de sa mère d’expérimenter de nouveaux traitements.

 

La très grande force de ce roman est de donner pleinement la parole à Eduard. Il raconte sa folie, monologue, discourt, s’interroge. Son questionnement est pertinent et plein de lucidité. Nous sommes en dialogue permanent avec lui. Il est fin, drôle parfois, il nous fait réellement entrer de plein pied dans cette maladie si grave et déroutante. Sa voix croise celle de sa mère, celle qui ne l’a jamais abandonné quoiqu’il lui en coûte. Parfois Albert Einstein intervient. Il s’excuse faiblement, reconnaît qu’il fut un père absent. Le cas de son fils lui semblait un problème sans solution. C’est la part secrète mais très humaine de la famille Einstein qui est exprimée ici.

 

Laurent SEKSIK, l’auteur, médecin et dramaturge, a trouvé le ton juste et la bonne cadence pour rendre un réel hommage à cette famille bousculée et occultée par un trop grand génie. La forme, le style, le fond forment un tout. À conseiller.

 

Laurent SEKSIK, Le cas Eduard Einstein, roman, 294 pages, Flammarion, 2013.



16/02/2022
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