Vers l'horizon

Kathleen Dean Moore , "Petit traité de philosophie naturelle". Gallemeister , janvier 2020 ,184 p . 8.10 euros .

Kathleen Dean Moore est écrivain, philosophe et naturaliste. Elle a passé son enfance dans l’Ohio et enseigné la philosophie à l’université de l'Oregon , dispensant des cours sur l’éthique environnementaliste et la philosophie de la nature . Activement engagée dans la défense du monde sauvage , elle est l’auteur de nombreux essais et récits unanimement salués par la critique et le public américains . 

Au moyen de toute une série de récits et d’observation de la nature durant  différentes périodes  de sa vie , l’auteure nous immerge dans une nature et des décors sans commune mesure avec ceux que nous connaissons en Europe . Avec  un style qui nous accroche pour nous livrer ses émotions visuelles, elle enchante nos esprits tout en nous ouvrant à de délicates réflexions sur notre existence et le cours de la vie  en général .Ces descriptions tout en éveillant nos sens d’une manière apaisante ancrent  notre esprit dans la réalité du monde  ainsi que sa conception et sa  création . Elle nous fait profiter de son grand savoir de naturaliste et de philosophe .Car, elle nous invite à apprécier la nature et la faune qui nous entourent en comprenant mieux leur utilité et leur interaction qui peut également servir de guide et d’exemple pour mieux nous réaliser dans nos propres vies et nos rapport aux autres . 

Elle pousse un cri d’alarme pour que nous respections l'entièreté de ce qui constitue notre environnement ! Elle est convaincante tant par ses révoltes envers les  nombreuses agressions perpétrées par les humains  sur cette belle nature et foisonnante faune. Et aussi par  son écriture destinée à calmer nos angoisses afin de mieux nous connaître nous même afin de mieux profiter de notre vie .

Ses descriptions et expériences sont très bien exprimées :

p 65, “ Au premier coup, la pelle s’enfonce dans le sable humide auquel elle imprime sa forme avant qu’il ne retombe à terre. Au deuxième, elle traverse la vase et heurte avec un cliquetis sonore les galets et le contour rugueux des coquilles d'huîtres. Le trou se remplit d’eau. Au troisième coup, la vase déborde de part et d’autre de la pelle, y laissant un amas de clams . Je m’agenouille pour les ramasser et les fais  choir à grand bruit dans le seau .”

P68 :” Le temps procède linéairement, il y a mille six cent ans. Dieu a pris  cette ligne temporelle et l’a découpée en petits tronçons afin d’en attribuer un morceau à chacun de nous. Je glisse le long du petit segment qui m’est alloué, dans le vent qui fait voler mes cheveux, plaque ma chemise contre mon corps, m’oblige à faire des moulinets avec mes bras et mes jambes tout en fermant les yeux très fort . “

P111 “ Si l’un de nous perd la mémoire, saurons-nous le reconnaître en observant les ombres qu’il projette ? Que deviennent les souvenirs lorsqu’ils sont chassés des lieux où ils étaient enracinés ? Lorsque le temps change l’ordre des mois, efface les images , raye les lieux sur une carte ? Et, inversement, que deviennent ces lieux quand disparaissent les souvenirs ?” 

P175 “ Il est parfois nécessaire de faire le point en tenant compte non pas de vos prévisions, mais de ce que vous dictent vos sens, de ce que vous apprend la ligne d’horizon “ 

Et je termine ces extraits avec cette réflexion qu’elle  se fait  à propos de sa fille ,

p 180 : “ Mais l’expérience va parfois à l’encontre des théories, et l’on ne peut tout prévoir dans la traversée de la vie . Je n’avais pas idée que lorsque ma fille deviendrait adulte, nous serions adultes ensemble . Qu’elle apprendrait des choses que je ne pouvais lui enseigner, qu’elle aimerait l’eau encore plus que moi . Je n’avais jamais imaginé qu’un jour, c’est moi qui irais vers elle pour qu’elle me protège . C’est bien normal , j’imagine. C’est une bonne chose. C’est juste un peu surprenant. “

Au travers de  cette œuvre verdoyante, l’écrivain philosophe-naturaliste nous invite à regarder . Regarder la nature qui nous entoure afin d’observer notre rapport au vivant afin de nous ramener à l’essentiel .