« Marcher vers l’inconnu » - Mardesic Frère jack, par Delphine Gillès de Pélichy
"Marcher vers l'inconnu " Mardesic Frère Jack par Delphine Gillès de Pélichy
« Marcher vers l’inconnu » - Mardesic Frère jack, Ed. Emmanuel, mai 2021- 129 pages- 16.00 € - lu par D.G.P.
Première surprise, un livre de Frère jack !
Deuxième surprise, la préface de Père René-Luc, l’auteur de « Dieu en plein cœur ». Il introduit ces « fioretti » en soulignant ce que la démarche franciscaine a d’héroïque et d’extraordinaire, dans sa simplicité : « Je sors et là, je suis incapable. Incapable de tendre la main pour mendier. Je me mets à pleurer sur moi, sur mon orgueil. Je comprends que l’appel franciscain est vraiment particulier, que nous ne sommes pas tous capables de vivre cette radicalité au quotidien, et que seuls ceux qui sont appelés sont capables de le vivre toute une vie ». (p. 8)
Frère Jack, lui, s’est senti appelé à ces missions « à la franciscaine ».
Etudiant à Rome, il se qualifie d’« idéaliste et de discipliné, aspirant ardemment à la sainteté. » (p. 153).
« Cette recherche de la sainteté à la force du poignet a fait de moi un religieux coincé, rigide, manquant totalement de spontanéité. » (p. 153)
Le témoignage de l’un de ses frères, Frère Paul, « réveille en (lui) la nostalgie et le désir de tout franciscain :
la joie et la liberté dans la pauvreté ». (p. 154) S’ensuivra une première démarche, qui confirme sa vocation de missionnaire dans la rue.
Souvent muni de son hangpad (« Puissance de l’art pour parler de Dieu » (p. 127)), toujours accompagné d’un Frère, ou d’amis, ou d’une poignée d’étudiants, Frère Jack arpente les rues des quartiers défavorisés, que ce soit en Espagne, en Italie, en Belgique ou encore en France, confiant en la providence qui lui réservera des rencontres bouleversantes. La providence agit, car Frère Jack est un passeur de la grâce.
Son instrument de musique, sa bure mais certainement aussi son sourire et sa joie interpellent. Nul n’est indifférent : nombreux sont les sympathisants, d’autres se montrent hostiles, tous finissent par échanger avec lui : homosexuels, punks, étudiants, sans-papiers, musulmans, artistes…
Mais Frère Jack ne craint pas de dévoiler, avec humour et simplicité, ses agacements, ses doutes et ses limites, ce qui le rend d’autant plus attachant. L’histoire du carton m’a beaucoup touchée, tant on s’y retrouve (cf chap. 10).
Hélas, nul n’est prophète en son pays. C’est ainsi que Frère Jack a dû se rendre à l’évidence : ses frères et sœurs dans la foi sont souvent moins généreux que ceux des « périphéries ». Mais l’amertume n’a pas de place dans ce récit. « Quel est le secret d’une fraternité qui tient la route ? La prière. » (p. 111)
Les expériences de mission sont émaillées d’écrits de Saint François et d’histoires franciscaines, qui attestent qu’au XXIème siècle, nos chers frères franciscains conventuels, dont Frère Jack, incarnent encore et toujours l’esprit fondateur.
Ce récit biographique, écrit à quatre mains, touche par sa simplicité, son humour (on l’a déjà dit mais il est bon de le répéter), son humilité, sa tendresse et sa Foi sans faille en la providence et en la grâce.