"Trois" de Valérie Perrin par Framboise Boël
"Trois" de Valérie Perrin par Framboise Boël
“Trois” de Valérie Perrin.
Souvenez-vous: La cour de récré, l’impression d’être un Martien, les autres tellement bruyants, les livres refuges, le temps long.
Et puis, quelqu’un. Un autre qui s’approche et vous prend la main. Qui vous sort de la solitude et vous ramène au monde.
Trois, ce sont les vies de Nina, Étienne et Adrien, qui se sont trouvés aux rivages de l’enfance et avancent ensemble à travers les eaux mouvementées du temps qui passe.
Valérie Perrin, à qui l’on doit déjà les merveilleux “Changer l’eau des fleurs” et “Les oubliés du dimanche”, démontre par ce grand roman qu’on ne peut pas devenir soi tout seul.
Un conseil : relisez le début après avoir tourné la dernière page.
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“Il y a les souvenirs, le présent et nos vies d’avant qui changent de parfum. Quand on change de vie, on change de parfum.
L’enfance a celui du goudron, d’une chambre à air et de la barbe à papa, du désinfectant des salles de classe, des feux de cheminée qu’exhale l’haleine des maisons les jours de froid, du chlore des piscines municipales, de la transpiration accrochée aux survêtements dans les rangs deux par deux en revenant de la gym, des Malabar roses dans la bouche, de la colle qui fait des fils sur les doigts, des Carambar coincés entre les dents, d’un sapin de Noël planté dans le cœur.
L’adolescence a l’odeur d’une première taffe, d’un déodorant musqué, d’une tartine beurrée dans un bol de chocolat chaud, du whisky-Coca et des caves transformées en salles de bal, du corps qui désire, de l’Eau précieuse, du gel pour les cheveux, du shampoing aux œufs, du rouge à lèvres, des effluves de lessive sur un jean.
Les vies d’après, celle de l’écharpe oubliée par son premier chagrin d’amour.
Et puis il y a l’été. L’été appartient à tous les souvenirs. Il est intemporel. C’est son odeur qui est la plus tenace. Qui s’accroche aux vêtements. Que l’on cherche toute sa vie. Les fruits trop sucrés, le vent de la mer, les beignets, le café noir, l’Ambre solaire, la poudre Caron des grands-mères. L’été appartient à tous les âges. Il n’a ni enfance ni adolescence. L’été est un ange.”